Sous-traitance : dossier spécial

Points de vue d’expert | 31 mars 2014

Sous-traitance : respectez-vous toutes vos obligations ?

Que ce soit par manque de ressources en interne, par souci de flexibilité ou pour se concentrer sur son cœur de métier, le recours à la sous-traitance concerne de nombreuses entreprises. Mais la sous-traitance n’est pas un choix anodin : il peut mettre en cause votre responsabilité si vous ne respectez pas un certain formalisme, récemment renforcé par la législation… 

 

Obligation de vigilance

Depuis le 1er janvier 2012, pour tout contrat portant sur une opération de prestation de services dont le montant global est d’au moins 3 000 €, l’entreprise donneuse d’ordre est tenue de vérifier que son sous-traitant respecte ses obligations de déclarations sociales et de paiement des cotisations et contributions sociales.
A noter : ce montant de 3000 € s’entend toutes taxes comprises, et même s’il fait l’objet de plusieurs paiements ou facturations.

Concrètement, il s’agit de demander à son sous-traitant un document attestant de son immatriculation, ainsi qu’une attestation de vigilance délivrée par l’Urssaf. Cette dernière mentionne notamment :

  • Le nombre de salariés employés et le total des rémunérations déclaré lors de sa dernière échéance
  • La fourniture des déclarations sociales et le paiement des cotisations et contributions afférentes

Cette attestation doit obligatoirement être produite lors de la conclusion du contrat, puis tous les 6 mois jusqu’à la fin du contrat. A défaut, l’entreprise doit s’abstenir de conclure ou de poursuivre la relation contractuelle, sous peine de voir éventuellement sa responsabilité engagée…

 

L’obligation de vigilance ne s’arrête pas à la simple remise formelle de ces documents. Vous devez en outre vérifier :

  • Lauthenticité de l’attestation de vigilance.

En pratique, il s’agit de saisir directement sur le site de l’Urssaf le code de sécurité figurant sur l’attestation fournie par votre prestataire afin d’obtenir la confirmation de la validité et de l’authenticité du document remis. 

Retrouvez plus d’informations sur les démarches à accomplir auprès de l’Urssaf dans leur guide en ligne :http://www.urssaf.fr/images/ref_2138-GuideEnLigne-AMPAVG.pdf

  • La concordance des informations dont vous disposez sur votre sous-traitant,
  • La capacité du sous-traitant à réaliser les travaux confiés, au regard des informations mentionnées sur l’effectif et les rémunérations. En cas de doute, il vous appartient, par tous moyens, d’obtenir de votre prestataire l’assurance qu’il peut réellement assumer le travail faisant l’objet du contrat.

Conseil : ne négligez pas ces formalités et vérifications simples mais indispensables. Si votre prestataire se voyait poursuivi pour travail dissimulé, vous pourriez voir votre responsabilité pénale engagée, être tenu solidairement d’assumer le paiement des impôts, taxes et cotisations obligatoires dus par votre sous-traitant, voire être exposé à de lourdes sanctions administratives (perte des exonérations et réductions de charges applicables à vos salariés sur toute la période où le délit a été constaté, remboursement des aides publiques perçues…).

 ******

 

Sous-traitance auprès d’un auto-entrepreneur : comment écarter le risque de requalification en salariat ?

Avec le succès du régime « auto-entrepreneur », créé en 2008 pour simplifier les formalités administratives et les déclarations sociales et fiscales des travailleurs indépendants, la sous-traitance auprès d’ « auto-entrepreneurs » s’est largement développée. Mais attention : le risque de requalification de cette relation en contrat de travail à l’occasion d’un contrôle de l’Urssaf est important…

En effet, si la loi prévoit un principe de présomption d’indépendance (article L 8221-6 du Code du Travail) dès lors qu’un prestataire est régulièrement répertorié et/ou affilié en tant que travailleur indépendant aux registres et organismes sociaux dont il dépend, l’Urssaf peut décider de requalifier une situation de sous-traitance en se fondant sur un faisceau d’indices allant dans le sens d’un salariat déguisé.

Or, la requalification peut être lourde de conséquences… et entraîner notamment :

  • Le paiement des retards de salaires et de charges patronales et sociales afférentes
  • Un redressement de l’Urssaf
  • 6 mois d’équivalent de salaire au titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé
  • Des dommages et intérêts pour licenciement abusif en cas de rupture du contrat de travail
  • De l’emprisonnement avec sursis

 

Comment se prémunir d’une requalification ?

Vous ne risquez rien dans la mesure où aucun lien de subordination ni de dépendance économique, caractères essentiels du contrat de travail, ne peuvent être établis entre votre prestataire et votre entreprise.

Concrètement, cela implique de :

  • Ne pas imposer de travailler dans vos locaux
  • Ne pas imposer d’horaires de travail ni de consignes autres que celles strictement nécessaires aux exigences de sécurité sur le lieu de travail
  • Eviter de fournir matériels et équipements autres que ceux nécessaires à sa sécurité
  • Ne pas facturer le travail de votre sous-traitant en nombre d’heures ou de jours  (privilégiez par exemple les forfaits, les appointements en fonction du niveau d’achèvement, un acompte en début de mission complété d’un solde en fin de mission…)
  • Vérifier que vous n’êtes pas le seul et unique client de votre prestataire en lui demandant de vous fournir des factures adressées à d’autres clients

Mieux vaut éviter également d’avoir recours aux services d’un ancien salarié, surtout si ce dernier exerçait des fonctions identiques ou proches de celles correspondant au travail sous-traité.

 

Conseil : adoptez les mêmes réflexes qu’avec les entreprises classiques auprès desquelles vous sous-traitez. Lors de la conclusion de votre contrat de sous-traitance, demandez à votre prestataire de vous fournir son numéro SIRET, les documents attestant de son inscription comme auto-entrepreneur et de son inscription au registre des métiers le cas échéant, ainsi qu’un certificat d’assurance professionnelle et « responsabilité civile ».