COMITÉ SOCIAL ET ECONOMIQUE (CSE) : NOTION ÉTABLISSEMENTS DISTINCTS

COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE 19 DECEMBRE 2019, N° 18-23.655

Pour la première fois, la Cour de Cassation s’est prononcée sur la mise en œuvre des règles issues des ordonnances Macron relatives à la détermination des établissements distincts pour la mise en place des comités sociaux et économiques (CSE). Elle précise la notion d’autonomie de gestion, critère introduit par les ordonnances pour la fixation du périmètre de l’établissement distinct.

Dès lors que l’entreprise est composée d’au moins 2 établissements, des CSE doivent être mis en place au niveau de chacun de ces établissements (avec un CSE central au niveau de l’entreprise). Le nombre et le périmètre des établissements distincts doit faire l’objet d’une négociation entre l’employeur et les organisations syndicales représentatives.

A défaut d’accord collectif, l’employeur définit unilatéralement le nombre et le périmètre des établissements distincts. Dans ce cas précis, la loi prévoit qu’il doit tenir compte de « l’autonomie de gestion du responsable de l’établissement, notamment en matière de gestion du personnel ».

Par cet arrêt du 19 décembre 2018, la Cour de cassation précise pour la première fois ce critère de l’autonomie de gestion introduit par les ordonnances Travail : « caractérise un établissement distinct l’établissement qui présente, notamment en raison de l’étendue des délégations de compétence dont dispose son responsable, une autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l’exécution du service ».

La Chambre Sociale s’aligne ainsi sur la Jurisprudence du Conseil d’Etat (CE 29.06.73, n°77982 ; CE 27.03.96, n°155791) relative aux établissements distincts pour la mise en place des comités d’entreprise (CE). Ce dernier avait en effet dégagé une définition reposant avant tout sur les pouvoirs consentis au responsable de l’établissement. Son autonomie de décision en matière de gestion du personnel et d’exécution du service devait permettre le fonctionnement normal des comités d’établissement.

Cette notion d’autonomie de gestion présente à notre sens certains inconvénients pouvant s’avérer majeurs, à savoir :

d’une part, cette notion d’autonomie peut manquer d’objectivité. La détermination des établissements distincts demeurant eu libre gré de l’employeur, qui pourra, ou non, délivrer une délégation de pouvoir au chef d’établissement en fonction de sa volonté d’y voir, ou pas, un comité avec des représentants du personnel fonction des situations, climat social ou autres….

d’autre part, cette définition réduit considérablement les niveaux de représentations.

Avant les ordonnances Macron et la fusion des instances représentatives du personnel, coexistaient plusieurs définitions de l’établissement distinct. Ainsi, les délégués du personnel pouvaient être mis en place dans tout établissement d’au moins 11 salariés « constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres susceptibles de générer des réclamations communes ou spécifiques et travaillant sous la direction d’un représentant du chef d’entreprise, peu important que celui-ci n’ait pas le pouvoir de se prononcer lui-même sur ces réclamations ».

Cela permettait une représentation en proximité.

La définition posée par la Cour de cassation risque de restreindre de ce fait et rendre plus difficile la représentation en proximité par le CSE.

Cet arrêt confirme ainsi la nécessité de passer par la voie négociée pour la détermination des établissements distincts afin de débattre des critères à retenir ou non entre employeur et partenaires sociaux et ce, afin de tenter de conserver une représentation de proximité des salariés.